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alsace
J'ai toujours un faible pour cette région, origines alsaciennes obligent, et c'est un réel plaisir de suivre cette route des vins qui serpente à travers les collines du vignoble, au pied des pentes boisées des Vosges. Le vignoble s'étend du nord au sud sur plus de 170 km. Son parcours est un pur bonheur : des villages fleuris aux winstubs, des collines ondulées, où se dressent fièrement les vignes prêtes au combat comme des troupes de légionnaires romains à la multitude des crus, les uns plus typés que les autres. L'homme vient s'associer à un terroir hors du commun, où l'on élève des vins sans concurrence, avec cette typicité exceptionnelle. Abrité des influences océaniques par le massif vosgien qui lui procure l'une des pluviosités les plus faibles de France (450 à 500 mm d'eau par an), le vignoble d'Alsace bénéficie d'un climat semi-continental ensoleillé, chaud et sec. Ce climat est propice à une maturation lente et prolongée des raisins, et favorise l'éclosion d'arômes d'une grande finesse. La géologie alsacienne représente une véritable mosaïque, du granite au calcaire en passant par le gneiss, le schiste, le grès… On ne peut pas confondre un vin d'Alsace avec un autre cru, tant les terroirs laissent s'exprimer particulièrement, ici, le Riesling, là, le Gewurztraminer ou le Pinot Gris. Attention à la complexité des crus et lieux-dits et lisez bien les étiquettes, pour ne pas confondre les clos, les Grands crus ou les communes, et à la dépersonnalisation de quelques vins, notamment en Riesling, qui commencent à être bien trop ronds et loin d'une typicité réelle, où la nervosité devrait être de mise. Appréciez en tout cas l'extraordinaire convivialité des hommes de la région et les vrais vins typés dont les meilleurs atteignent une typicité rare et procurent la joie du vin, à des prix très sages.
L'histoire des vins d'Alsace
Avant la conquête romaine, l'Alsace cultivait la vigne. Venue, sans doute, de la Provence gauloise par les vallées du Rhône et de la Saône, la vigne s'était établie sur les rives vermeilles du Rhin et de la Moselle. Des jardiniers syriens et grecs, des vignerons de Massilia l'y avaient implantée. Dans certains arrangements des échalas, l'ampélographie devine quelque lointaine habitude gréco-orientale. La vigne fut connue avant l'irruption des conquérants latins. Au Moyen Âge, l'Alsace produit d'énormes quantités de vins recherchés. Des bateaux ou des chariots les conduisent chez les Souabes, les Bavarois, les Bataves jusqu'en Suède. En Angleterre, à la cour d'Édouard III, ils sont connus sous le nom de vins “d'Aussay” (nom de l'Alsace au Moyen Âge). Les premiers vignerons cultivaient les vignes pour les puissantes abbayes et les maisons seigneuriales si nombreuses dans l'Alsace féodale et religieuse. Avec l'émancipation des communes, ils peuvent travailler quelques lopins de terre abandonnés à leur profit. Beaucoup plus tard, ils purent en acquérir des seigneurs. Sans se faire “plébéienne”, la vigne se morcela. Parmi les confréries, se détache celle de la Corne. Nul ne pouvait y être admis s'il ne vidait d'un trait une Corne d'aurochs, d'une contenance de 2 pots, soit 2 litres actuels. Les plus nobles familles n'obtenaient d'y être admises qu'après avoir vidé leur Corne pleine deux fois au lieu d'une. Ainsi fut justifié le nom de wiedercome (revenez-y), donné à un vase à boire.
L'Alsace à table
L'Alsace est l'exemple caractéristique des grandes régions vinicoles et gastronomiques françaises où le mariage des vins et des mets peut surprendre le plus. Bien sûr, on connaît les spécialités du pays, les choucroutes, les fromages, les charcuteries ou le kouglof, et l'intensité aromatique des grands crus, alliant finesse et richesse en bouche. On se doute bien qu'un vin d'Alsace se déguste aussi avec des crustacés ou des fruits de mer mais on oublie parfois l'extraordinaire osmose d'un Muscat avec des asperges, par exemple. Les vins peuvent se boire pratiquement tout au cours d'un repas. Sur la choucroute (Riesling), avec une sole meunière (l'Alsace est riche également de poissons de rivière), avec des crustacés. Plus original, le fameux “poulet au Riesling”, une blanquette de veau à l'ancienne. La puissance de son bouquet et sa persistance aromatique en bouche placent le Gewurztraminer comme un apéritif idéal. Il est superbe avec un pâté en croûte ou une terrine de foies blonds, ainsi que sur la tarte flambée. Les Vendanges Tardives se savourent sur un foie gras d'Alsace, au naturel ou en brioche, et sur des fromages forts comme le maroilles, le munster ou le roquefort.
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